24. Une nuit dans une villa

24. Une nuit dans une villa

Vendredi, Janvier 3, 2025 [ROMAN]

Chapitre 24 IOVMEDR

Vous relevez la moto grâce à quelques enfants qui se sont précipités pour voir de quoi il s’agissait et vous reprenez la route.

Vous êtes trop tombé aujourd’hui. Vous remerciez le ciel de vous protéger autant, car sur la dernière chute, Lily aurait pu y rester : roue voilée, problème de direction, ou un autre problème quelconque mais votre voyage aurait pu s’arrêter là.

Vous espérez que vos amis en triporteur n’aient pas attendu trop longtemps. Vous tracez, prudemment cette fois.

Vous maîtrisez le sable… que c’est beau la confiance en soi !

Vous avez parcouru presque l’entier des kilomètres jusqu’au village, vous estimez être à 2, maximum 3 kilomètres de l’objectif quand vous distinguez le triporteur dans un angle étrange.

Ils ont crevé.

Vous vous arrêtez pour l’aider, vous lui devez bien ça.

Il refuse poliment. Il vous demande si vous avez un cric. Vous lui répondez :

- Allez, aujourd’hui c’est moi ton cric.

Vous comptez jusqu’à 3, et avec l’aide de l’autre jeune homme vous maintenez le véhicule suffisamment haut pour que le chauffeur puisse en changer la roue.

Vous êtes content d’avoir pu aider ces gens à votre tour. Mais pour la boisson, ça va être juste. La nuit est en train de tomber et vous ne savez pas où aller.

À la douane, ils avaient l’air de dire que la route jusqu’à Koumbia serait difficile, mais qu’ensuite, jusqu’à Boké, cela s’améliorait pour enfin devenir une vraie route jusqu’à Conakry.

Il vous faut réfléchir rapidement.

Il n’y a visiblement pas d’hôtel à Koumbia. Mais vous pourriez demander ?

Vous avez peu de liquidités.

Poursuivre jusqu’à Boké. Il n’y a que 150 kilomètres et il parait que la route s’améliore. Vous pourriez rejoindre l’hôtel avant Boké pour 20 heures. La dernière heure se ferait dans l’obscurité, mais pas totalement.

Ou alors simplement pénétrer un peu dans la jungle et y poser votre tente. La végétation est luxuriante, l’humidité dense et vous ne connaissez pas assez la faune et la flore du lieu pour oser y pratiquer du camping sauvage.

Tout en réfléchissant à toutes ces options, vous arrivez à Koumbia. Il est 18h30. Le soleil se couche à 18h36 et vous avez maintenant l’expérience de cette nuit africaine qui tombe comme une masse, en quelques minutes seulement. Vous arrêtez votre moto devant une échoppe de téléphonie. Votre idée c’est de rapidement acheter une carte sim et changer de l’argent.

Vous échangez quelques mots avec le responsable du lieu :

- Si vous avez besoin, je peux appeler un ami. Il possède une maison qu’il n’utilise pas, il peut peut-être vous la louer.

Cet ami, c’est un journaliste, commentateur de la radio locale, qui vous laisse dormir dans sa maison pour la modique somme de 35 francs, l’entier de votre fortune en cash. C’est cher, mais voilà, vous n’avez pas vraiment le choix. Pas de lumière, pas d’électricité du tout, un seau d’eau en guise de douche et un matelas sur lequel vous posez votre sac de couchage.

De toute manière, avec la journée que vous venez de passer, vous allez vous endormir rapidement.

Votre cheville vous fait toujours mal. Vous n’osez regardez votre coude.

Merci la vie de me permettre de continuer d’avancer.

Vous vous faites presque une crise d’angoisse de prendre conscience que pour une stupide confiance en soi mal placée, vous avez failli tout faire foirer.

Mais durant ce voyage, vous en êtes certain, quelqu’un, une force vous protège.

En Suisse pour le même accident, vous auriez pris perpet’.

Cette fameuse phrase : l’important n’est pas de tomber, mais de se relever.

C’est à la fois tellement vrai, mais si loin d’une nécessité objective.

Chaque chute est différente. Quand vous avez tout perdu, en 2016, vous vous êtes relevé, mais à quel prix.

Filou n’a pas aimé que vous lui demandiez d’arrêter de traiter certaines affaires de votre entreprise car vous aviez acquis la conviction qu’il était incapable de quoi que ce soit.

Présenté un an auparavant comme un actionnaire belge, spécialiste des chiffres et de la comptabilité, il vous avez proposé d’investir dans votre société pour 40% des parts en échange d’un travail rémunéré qui lui fournirait son passeport suisse.

Vous aviez promis, tout en restant prudent : un actionnaire et un employé, ce n’est pas pareil.

Vous lui avez rapidement donné votre confiance car il maîtrisait votre faiblesse : les chiffres, la comptabilité, les finances. Vous lui avez tout montré. Vous l’avez emmené partout. Vous lui avez présenté tout le monde.

Il était le directeur financier de votre société et de votre expérience, il faut donner toute sa confiance à quelqu’un dont on attend de lui le meilleur : si c’est un imposteur la honte l’étouffera et si c’est un gars qui en vaut la peine, il saura vous remercier pour cela.

HELVETIA Games, votre société, créée en 2012, n’a jamais connu de pertes. Elle n’a pas non plus fait des bénéfices mirobolants, mais jamais de pertes. C’est déjà ça.

En 2016 pourtant, la société essuiera une perte de 220’000 CHF. Des chiffres qui donnent le vertige. Mais Filou sait de quoi il parle : il vous explique que c’est dû aux investissements, que c’est normal. Vous décidez d’organiser un séminaire d’entreprise dans lequel Filou explique ce qui s’est passé et prend le parti, sans vous prévenir, de serrer les bretelles des employés de votre boutique de Lausanne, et en particuliers à son gérant.

Mais vous avez confiance en Filou. C’est votre associé. Votre CFO. Peut-être même un ami. Vous vous entendez bien.

Vous ne saviez pas alors que rien de ce qu’il ne vous avait dit était vrai : il n’a aucune compétence en matière de finances. A l’université, il n’a pas étudié HEC, mais Géographie, avec option finance.

Tout cela, vous l’apprendrez quand vous vous douterez peu à peu que non seulement Filou est un incapable, mais que pour cacher son incapacité, il truque les comptes de votre société.

Pas de commentaire encore
Recherche